Un océan de plastique...
Chaque année, 8 millions de tonnes de matière plastique finissent en pleine mer. Ces déchets causent de graves dégâts à la vie marine. Mais qu’en faire ?
La plus gigantesque décharge de plastiques au monde se cache au large de l’archipel d’Hawaii. C’est le Great Pacific Garbage Patch, la «Grande Poubelle du Pacifique», vaste comme près de six fois la France : 3,4 millions de kilomètres carrés de superficie pour 22 200 kilomètres de circonférence ! On la surnomme «le 7e continent», ce qui évoque un amas si compact de sacs, bidons et autres bouteilles qu’on pourrait y marcher dessus. Mais cette image est trompeuse, explique François Galgani, écotoxicologue et spécialiste de ce phénomène à l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer) : «Il s’agit en réalité d’une énorme soupe où se mêlent des débris épars de plus d’un demi-centimètre et une myriade de microfragments en suspension.» D’où viennent ces détritus ? De la terre ferme, à 80 % ! Car sur les quelque 300 millions de tonnes de plastique produites chaque année dans le monde, 8 millions en moyenne finissent en haute mer.
Selon l’évaluation du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), 206 kilos de ce matériau synthétique se déversent ainsi chaque seconde dans les océans. Abandonnés sur les trottoirs des villes, des campagnes ou des plages, oubliés dans des décharges à ciel ouvert, ces rebuts souvent légers sont portés par le vent jusque dans les rivières et les fleuves, quand ils n’y sont pas jetés directement. Les cours d’eau les acheminent à leur tour vers les côtes et le grand large. Ils y dérivent pendant des années, lentement décomposés par le soleil et les vagues. Tôt ou tard, une partie d’entre eux est piégée dans des zones marines où convergent des courants circulaires baptisés «gyres». Ces derniers, sous l’influence de la rotation de la Terre, s’enroulent dans le sens des aiguilles d’une montre dans l’hémisphère Nord, et en sens inverse dans l’hémisphère Sud. «Aspirées» par la force centripète, les particules de plastique se concentrent au centre de ces vortex géants et s’y accumulent jusqu’à 30 mètres de profondeur. Elles y stagneront pendant des dizaines, voire des centaines d’années, avant d’être réduits à l’état de molécules non toxiques.
Situés à l’écart des aires de pêche et des routes commerciales ou de plaisance, ces dépotoirs flottants restèrent ignorés jusqu’en 1997. Au retour d’une course à la voile Los Angeles-Hawaii par une voie délaissée par les marins, le navigateur américain Charles Moore tomba alors par hasard sur le plus énorme des gyres, le Great Pacific Garbage Patch. En 1999, il créa, pour l’étudier, la Fondation de recherche marine Algalita, qui organisa sept expéditions sur le «terrain». Les scientifiques embarqués y dénombrèrent en moyenne 323 271 fragments de plastique par kilomètre carré ! De 2007 à 2013, vingt-quatre missions furent également conduites par divers pays pour débusquer d’éventuelles décharges en suspension sur d’autres océans. Résultat : chacun des cinq grands bassins – Pacifique Nord, Pacifique Sud, Atlantique Nord, Atlantique Sud et océan Indien – en héberge une ! Et la Méditerranée n’échappe pas à la règle. Afin d’évaluer la quantité totale des détritus, une équipe internationale a compilé les données recueillies lors de ces campagnes. Elle avance, dans la revue américaine Plos One de décembre 2014, le chiffre ahurissant de 5 250 milliards de débris de toutes tailles, soit 269 000 tonnes, piégées dans les cinq grands gyres océaniques, entre la surface et - 30 mètres ! Pire : la concentration du plastique qui y est déversé a été multipliée par cent depuis les années 1970. «Si rien n’est fait, elle pourrait décupler en quinze ans, passant de 8 millions de tonnes en 2010, à 80 millions en 2025 !» s’alarme la biologiste Jenna Jambeck (université de Géorgie, Etats-Unis) dans une étude publiée en février 2015 par la revue Science. Le gyre du Pacifique Nord serait alors aussi étendu que l’Europe ! Pour la première fois aussi, Jenna Jambeck dresse la liste des 192 pays côtiers impliqués dans cette catastrophe écologique, et détermine leur contribution respective.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Chaque année, 8 millions de tonnes de matière plastique finissent en pleine mer. Ces déchets causent de graves dégâts à la vie marine. Mais qu’en faire ?
La plus gigantesque décharge de plastiques au monde se cache au large de l’archipel d’Hawaii. C’est le Great Pacific Garbage Patch, la «Grande Poubelle du Pacifique», vaste comme près de six fois la France : 3,4 millions de kilomètres carrés de superficie pour 22 200 kilomètres de circonférence ! On la surnomme «le 7e continent», ce qui évoque un amas si compact de sacs, bidons et autres bouteilles qu’on pourrait y marcher dessus. Mais cette image est trompeuse, explique François Galgani, écotoxicologue et spécialiste de ce phénomène à l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer) : «Il s’agit en réalité d’une énorme soupe où se mêlent des débris épars de plus d’un demi-centimètre et une myriade de microfragments en suspension.» D’où viennent ces détritus ? De la terre ferme, à 80 % ! Car sur les quelque 300 millions de tonnes de plastique produites chaque année dans le monde, 8 millions en moyenne finissent en haute mer.
Selon l’évaluation du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), 206 kilos de ce matériau synthétique se déversent ainsi chaque seconde dans les océans. Abandonnés sur les trottoirs des villes, des campagnes ou des plages, oubliés dans des décharges à ciel ouvert, ces rebuts souvent légers sont portés par le vent jusque dans les rivières et les fleuves, quand ils n’y sont pas jetés directement. Les cours d’eau les acheminent à leur tour vers les côtes et le grand large. Ils y dérivent pendant des années, lentement décomposés par le soleil et les vagues. Tôt ou tard, une partie d’entre eux est piégée dans des zones marines où convergent des courants circulaires baptisés «gyres». Ces derniers, sous l’influence de la rotation de la Terre, s’enroulent dans le sens des aiguilles d’une montre dans l’hémisphère Nord, et en sens inverse dans l’hémisphère Sud. «Aspirées» par la force centripète, les particules de plastique se concentrent au centre de ces vortex géants et s’y accumulent jusqu’à 30 mètres de profondeur. Elles y stagneront pendant des dizaines, voire des centaines d’années, avant d’être réduits à l’état de molécules non toxiques.
Situés à l’écart des aires de pêche et des routes commerciales ou de plaisance, ces dépotoirs flottants restèrent ignorés jusqu’en 1997. Au retour d’une course à la voile Los Angeles-Hawaii par une voie délaissée par les marins, le navigateur américain Charles Moore tomba alors par hasard sur le plus énorme des gyres, le Great Pacific Garbage Patch. En 1999, il créa, pour l’étudier, la Fondation de recherche marine Algalita, qui organisa sept expéditions sur le «terrain». Les scientifiques embarqués y dénombrèrent en moyenne 323 271 fragments de plastique par kilomètre carré ! De 2007 à 2013, vingt-quatre missions furent également conduites par divers pays pour débusquer d’éventuelles décharges en suspension sur d’autres océans. Résultat : chacun des cinq grands bassins – Pacifique Nord, Pacifique Sud, Atlantique Nord, Atlantique Sud et océan Indien – en héberge une ! Et la Méditerranée n’échappe pas à la règle. Afin d’évaluer la quantité totale des détritus, une équipe internationale a compilé les données recueillies lors de ces campagnes. Elle avance, dans la revue américaine Plos One de décembre 2014, le chiffre ahurissant de 5 250 milliards de débris de toutes tailles, soit 269 000 tonnes, piégées dans les cinq grands gyres océaniques, entre la surface et - 30 mètres ! Pire : la concentration du plastique qui y est déversé a été multipliée par cent depuis les années 1970. «Si rien n’est fait, elle pourrait décupler en quinze ans, passant de 8 millions de tonnes en 2010, à 80 millions en 2025 !» s’alarme la biologiste Jenna Jambeck (université de Géorgie, Etats-Unis) dans une étude publiée en février 2015 par la revue Science. Le gyre du Pacifique Nord serait alors aussi étendu que l’Europe ! Pour la première fois aussi, Jenna Jambeck dresse la liste des 192 pays côtiers impliqués dans cette catastrophe écologique, et détermine leur contribution respective.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]