DES ENCEINTES PAS ENCORE TRES CONNUES MAIS DEJA TRES REUSSIES...XTZ Master M2 : grandeur et décadence
Depuis quelques années, il m'arrive régulièrement d'entendre parler du fabricant d'enceintes suédois XTZ, essentiellement à l'étranger d'ailleurs. Suite à de nombreux mois de discussions avec les équipes de XTZ, j'ai décidé de vous faire découvrir cette jeune marque qui souffle sa 11e bougie cette année, bien que l'homme à son origine, Olle Olliason ait déjà 30 ans d'expérience à son actif en matière de conceptions d'enceintes acoustiques. Pour cette petite première, nous avons porté notre choix sur la sculpturale enceinte XTZ M2. Un véritable choc. Présentation de la XTZ Master M2 :
Lorsque l'on entend Olle Olliason déclarer que l'objectif de sa marque est d'offrir le meilleur rapport qualité, prix et performance sur le marché, on aurait presque l'impression d'avoir entendu ce même refrain… à de nombreuses reprises. Néanmoins, lorsque l'on gratte un peu en dessous, la politique du fabricant s'inscrit dans la lignée de celle de certains fabricants américains (FVS par exemple), avec un objectif principal : réduire au minimum le nombre d'intermédiaires afin d'éviter une trop grande répercussion en bout de chaîne, autrement dit sur le prix de vente final. La fabrication des composants et haut-parleurs à grande échelle permet dans un même temps de gagner aussi en flexibilité.
Vu sous cet angle, le discours paraît effectivement cohérent. Mais dans le cas présent, avec une paire d'enceintes tarifée près de 2000 euros la paire, la notion de prise de risque est bien différente. Vu sous cet angle, le fabricant peut-il toujours se targuer d'offrir l'un des meilleurs compromis en matière de rapport qualité/prix/performances, comme il le déclare, d'autant plus au regard des références auxquelles la M2 fait face ? En matière de qualité de fabrication tout du moins, difficile de nier l'évidence.
Une composante haut de gamme qui débute par l'esthétique de la Master M2, et qui possède au minimum le mérite de proposer quelque chose de différent d'une grande majorité de bibliothèques proposée dans cette gamme de prix. Un lecteur me disait récemment que le design lui faisait quelque peu penser au casque de "
Dark Vador", je suis assez d'accord ;-)
Mais plus qu'un design, c'est le soin apporté à la finition et qualité de fabrication qui retient l'attention, et sur ce point le coffret a bénéficié d'un soin tout particulier. Car si le volume de l'enceinte même est peu banal, le choix des matériaux l'est tout autant. En lieu et place d'un coffret en MDF, le fabricant suédois a opté pour un nouveau matériau anti-résonance offrant une densité 40 % supérieure au MDF, avec un mélange d'époxy, polyuréthane, bulle organique et carbonate de potassium. La forme même du coffret, avec ces parois non parallèles, permet de réduire au minimum la réflexion et les ondes stationnaires. Il y a des éléments qui ne trompe pas, le poids notamment : 18,6 kg pour une paire d'enceintes bibliothèques tarifées sous les 2000 euros, c'est tout simplement unique.
Sur la partie haut-parleurs, XTZ fait le choix d'un tweeter à dôme souple de 30 mm, couplé à un double aimant en néodyme afin d'assurer un blindage magnétique efficace. Pour optimiser l'ensemble, il est associé à un guide d'ondes, non seulement pour améliorer la sensibilité du HP ou la distorsion, mais également garantir une meilleure dispersion.
XTZ joue la carte de la transparence au sujet de la collaboration avec le Norvégien SEAS pour le développement du haut-parleur médium/grave. Ce dernier utilise le Curv, un tout nouveau matériau composé à partir de polypropylène, qui selon le fabricant, combine à la fois la souplesse du thermoplastique et le niveau de performance de la fibre composite renforcée. Le cône Curv est également entouré d'une membrane en caoutchouc naturel afin de diminuer la suspension et les résonances périphériques. L'ensemble, installé dans un saladier en métal injecté, est piloté par un système d'aimants pourvu d'anneaux et d'une solide prise de phase en cuivre pour maintenir le refroidissement et la circulation de l'air autour de la bobine.
Le filtrage est confié à un dispositif Linkwitz/Riley, avec une pente à 12 et 18dB par octave sur le tweeter et médium. Il utilise entre autres des résistances MOX et des condensateurs de qualité audiophile Mundorf. Le câblage interne est réalisé à partir de câbles en cuivre torsadé.
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[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]L'arrière de l'enceinte laisse apparaître deux paires de borniers en fibre de verre. Un conseil toutefois, du fait de leur rapport dimensions/poids, il faudra prévoir en amont un pied stabilisé avec du sable pour supporter la charge. Je terminerais enfin par un petit mot sur le grand soin apporté au packaging, et les petites attentions de XTZ qui livre ses enceintes avec de (vraie) housses de protection et non un simple tissu, et une paire de gants pour manipuler les enceintes en toute sécurité.
Caractéristiques XTZ M2 :
- Tweeter à dôme 30 mm avec guide d'ondes
- Médium/grave SEAS Curv 16,5 cm
- Réponse en fréquence : 45 Hz - 29 kHz / 37 Hz - 29 kHz (in room), +/- 3dB
- Fréquence de coupure : 1.9 kHz
- Rendement : 8 dB
- Impédance nomimale : 8 Ohms
- Impédance minimum : 7 Ohms
- Borniers en fibre de verre, compatible bi-câblage et fiches bananes
- Puissance: 300 W IEC 268-5, 120 W IEC 268-5
- Dimensions (L x H x P) : 231 x 424 x 374 mm
- Weight: 18.6 kg
Matériel de test :
- Enceintes XTZ Master M2 (1940,90 euros la paire)
- Amplificateurs intégrés Yamaha DSP Z11
- Amplificateurs A/V : Onkio 838
- Lecteur réseau Sony HAP-Z1ES
- Oppo BDP-103EU
- DAC : Fostex HP-A8C, M2Tech Young DSD + Van Der Graff
- Câbles de modulation Oehlbach Silver, Wireworld Luna 7, Wireworld Starlight, MUSE 3
- Câble HP Real Câble
- Câble secteur JSV Audio Olympia
- Filtre secteur Oehlbach 907
Ecoutes de la XTZ Master M2 : chronique d'un choc annoncé
La première chose en prendre en considération avec la XTZ M2 est qu'elle demande de la patience, beaucoup de patience avant de se laisser apprivoiser. Il faudra compter une bonne cinquantaine d'heures de rodage pour qu'elle commence à se laisser appréhender, avant de laisser libre-cours à l'étendue de son savoir-faire une fois passé la centaine d'heures. Puisque nous avons face à nous une toute nouvelle marque, nous allons nous attarder longuement sur les éléments qui composent la signature XTZ. Chaque pays à sa propre conception de l'acoustique, mais les pays nordiques ont une approche très particulière, l'un des représentants les plus connus reste Dali, avec une approche musicale d'une infinie douceur, relaxante, et particulièrement expansive. Je m'attendais donc à retrouver certains petits éléments de ressemblances, c'est le cas, mais dans une certaine mesure seulement.
Je n'irais pas par quatre chemins, la Master M2 est sûrement l'une des bibliothèques les plus impressionnantes qu'il m'ait été donné d'écouter, tant ses capacités en matière de restitution atteignent un niveau rare dans cette gamme de prix. Comme souvent, je débute mes essais par The Freewheelin' (S.A.CD), un album que j'affectionne tout particulièrement pour deux raisons : le talent d'interprète de Bob Dylan, et la qualité même d'enregistrement – une constante sur la discographie de l'artiste –.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Après avoir entendus les M2 durant de nombreuses heures, sans les avoir encore véritablement écoutés, les premières notes de
Blowin in the Wind résonne avec beaucoup de naturel et d'authenticité, on se laisse transporter au gré du « vent » par la mélodie, mais ce qui m'intéresse tout particulièrement, c'est l'apparition de l'harmonica en réponse au refrain «
The answer my friend is blowin in the wind, the answer is blowin in the wind » qui peut laisser transparaître une incisivité plus ou moins prononcée sur le haut du spectre en fonction de la signature de l'enceinte écoutée et/ou des électroniques associées. L'enceinte XTZ reproduit chaque accord avec une extrême justesse et une grande précision, un constat plus appuyé encore par l'intensité du superbe solo final (toujours à l'harmonica) de
Girl from the North Country, qui donnerait l'espace de quelques instants, l'impression de voir l'harmonica de Dylan sortir des enceintes.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Une vraie maîtrise sur le haut du spectre dont l'enceinte XTZ fait pleinement étalage sur les Sonates à deux Violons de Jean-Marie Leclair (opus 12), elle sait accompagner la mélodie jouée par les violons Monica Weisman et Florian Deuter avec douceur, tact et précision. Elle peut néanmoins montre un visage plus autoritaire, d'une vivacité et d'une aération étonnante, à l'instar de la
Sonate IV en La Majeur, tout en conservant ce contrôle, cette fluidité et transparence qui la caractérise, ou dans un autre style, le solo vertigineux de David Gilmour sur
Another Brick In The Wall. Elle n'interprète à aucun moment la musique, elle la retranscrit de manière pure et extrêmement fluide, sans que l'ennui ou la fatigue ne viennent à aucun moment pointer le bout de leur nez. On se laisse facilement porter au gré des écoutes, les minutes filent plus rapidement qu'escompté...
Cependant, il sera nécessaire de prendre quelques précautions d'usage, en particulier le choix des électroniques auxquelles les enceintes seront associées, et ce pour deux raisons, à commencer par le rendement, les M2 sont de natures gourmandes et nécessitent une amplification capable de leur rendre justice. Dans un autre temps, du fait de leur transparence et de cette capacité innée à monter haut, très haut, le facteur de risque avec les amplifications « montantes » est une donnée à prendre en considération.
Une notion de transparence que l'on retrouve tout naturellement sur le médium, et peut-être même plus encore. La Master M2 est une enceinte exigeante sur les électroniques qui lui sont associées, mais elle l'est tout autant si ce n'est plus sur la source elle-même, cela possède un certain charme sur les enregistrements anciens ou l'on a plus affaire à une légère défaillance du matériel de prise de son qu'un mauvais enregistrement, je prendrais simplement pour exemple le crépitement perceptible sur certains enregistrements comme le
Live In Cook County Jail de BB King, ou la légère saturation des micros de la guitare de Muddy Watters sur
My Home Is In The Delta.
D'un autre côté, vous êtes prévenus, aucun cadeau ne sera fait aux enregistrements de mauvaise qualité, la plupart des albums des Red Hot Chili Peppers font figure de cas d'école, un cas parmi tant d'autres. La M2 n'est pas une faiseuse de miracles, elle respecte simplement la source, pour le meilleur comme pour le pire.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Ce médium apporte également un naturel et une authenticité des vocales troublante, à l'instar de la reprise de
Ne Me Quitte pas de Nina Simone, un grain de voix inimitable et un morceau toujours aussi bouleversant sur lequel la « petite » Suédoise, au-delà de la puissance naturelle déployée par la chanteuse afro-américaine et le superbe accompagnement au violon, parvient à conserver toute l'émotion et l'intensité des paroles de Jacques Brel.
La partie instrumentale bénéficie du même soin, les M2 apportent beaucoup de matière sur les instruments, tel l'album Brothers in Bamako ou les guitares d'Habib Koité et Eric Bibb se mêlent et s'entremêlent tout au long d'un voyage qui nous emmène tour à tour à Tombouctou et Bamako sur le ton de la gravité, en faisant un détour par Californie (L.A), une merveille de douceur et d'émotion entre blues américain et air traditionnel malien. Ou sur une partition plus jazzy Diagnostic, en particulier le mélange de sonorités de
Maeva in Wonderland, un voyage durant lequel Maalouf nous transporte en Orient, avant de basculer de la trompette au piano sur la seconde partie, qui prend cette fois en Amérique Latine entre les mains du batacuda Zalindê.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Dans les deux cas, pour ne rien gâcher, en complément du naturel et cette profondeur d'écoute procurée, les vocales et la section instrumentale jouissent d'une ouverture sublime. La spatialisation délivrée par la Master M2 est tout simplement diabolique, à tel point qu'en fermant les yeux nous n'avons plus l'impression d'être face à une bibliothèque, mais une enceinte de plus grande envergure. Elle n'aurait pas à rougir face à certaines grandes au vu de sa générosité...
Générosité, un adjectif qui sied parfaitement à un autre registre : le grave. Un médium/grave de 16.5 cm c'est plutôt attirant sur le papier, mais la qualité du rendu – excepté le filtrage bien entendu - reste en très grande partie dépendante du coffret. Et de ce côté-là, comme déjà évoqué en introduction, il n'y a absolument aucune inquiétude à avoir, même à de hauts niveaux de pression l'enceinte XTZ ne bouge pas d'un seul millimètre, le contrôle du HP en matière de résonnances est optimal.
Le grave de la Master M2 nécessite néanmoins quelques ajustements en fonction de l'acoustique et la taille de la pièce, raison pour laquelle elle est accompagnée de deux mousses : une mousse pleine pour utiliser l'enceinte en configuration close, et une mousse en configuration Bass reflex avec faible résonance qui laisse transiter une partie de l'air expulsée par le HP.
Dans le premier cas, l'insertion de la mousse dans le port Bass-reflex à pour effet de donner un grave plus tendu, mais une courbe qui descend logiquement moins bas, tandis que la seconde mousse fait office de solution intermédiaire, on obtient un grave plus équilibré, ce qu'il perd en tension il le gagne en profondeur. Dans le dernier cas (aucune mousse, Bass reflex), on obtient un grave plus dynamique, plus vivant, mais une profondeur en retrait.
Dans les trois cas, que l'on choisisse d'accorder plus haut ou plus bas, que l'on préfère un grave tendu ou plus soutenu, dans les deux cas les promesses sont à la hauteur des résultats à l'image de la sensation de dynamique procurée lors de l'attaque de batterie de Don Heley sur
Hotel California, l'intensité du râle aigu-grave du
Parisiennes Walkways de Gary Moore, ou
Bombs over Ibiza de Hans Zimmer (The Dark Knigh Rises). De ce côté-là, on en a pour son argent.
Conclusion : une nouvelle étoile
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Avec la Master M2, XTZ nous délivre une enceinte bibliothèque réellement digne d'un produit haut de gamme. Une qualité de fabrication superbe, une esthétique séduisante, mais ce qui impressionne davantage c'est le niveau de performances atteint, qui n'aurait nullement à rougir de la comparaison avec certaines concurrentes plus onéreuses, bien au contraire (!). Une enceinte capable de procurer un degré d'émotion rare, c'est aussi cela la marque des grandes, et assurément, à certains égards la Master M2 mérite qu'on la considère comme telle. Un vrai coup de coeur.
La note finale [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
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[th]Ce que l'on aime[/th][th]Ce que l'on regrette[/th]
- Une conception et finition "haut de gamme"
- Très bel équilibre tonal
- Transparence, aération et précision du haut du spectrel
- Un médium superbe, beaucoup de matière sur les vocales
- Une spatialisation référentielle
- Un grave dense, parfaitement contrôlé
- Une très belle profondeur d'écoute
- Un rapport qualité/prix
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- Aucune pitié sur les enregistrements moyens ou mauvais
- Sa gourmandise nécessite une amplification "cohérente"
- Une transparence à double/tranchant sur les électroniques brillantes
- À quand une version blanche ?
- Je cherche, je cherche...
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